L’artiste finlandais Tommi Musturi avec Samuel crée — par la répétition de formes simples qui mutent — une BD minimaliste à plusieurs lectures. Sous l’apparente simplicité surgissent plein de détails, d’échos visuels ainsi que des failles dans les contraintes. Il existe aussi des leçons de lecture des images.
Celle-ci implique des ralentis devant une telle BD “extrospective” faite de tensions et de libertés, là où tout n’est pas forcément facile à comprendre si bien qu’un tel corpus et son personnage impliquent plusieurs relectures pour apprécier diverses dissonances.
A la fois — du moins en apparence — “mannequin de crash-test et rat de laboratoire”, Samuel nous introduit dans un méta-monde habité de figures humaines étranges qui vivent selon une logique différente de la nôtre. Semblant sortir de la réalité “vraie” par accident, ce Samuel dépasse la limite de la fiction classique pour entrer dans une autre dimension de l’Histoire et des histoires.
Et ce, même si la réalité du personnage s’écrase sur un monde encore plus grand que lui. Preuve que sans cesse Tommi Musturi cherche à nous faire sortir de notre univers par cette figure de vagabond dont le graphisme est par lui même essentiel et introduit dans l’espace de la BD une figure amère.
Elle est adjacente à toute l’histoire de l’art graphique qu’elle pousse plus loin là où le créateur fait parfois des clins d’oeil à ses anciens maîtres dont Hergé, sa ligne claire et même son Milou.
Jean-Paul Gavard-Perret, Le Littéraire, octobre 2023